vendredi 19 juillet 2019

Les écrans une logique d’assouvissement


A, a 13ans. Il passe le WE huit heures par jour à jouer et 4heures à regarder les séries et les informations à la TV. Lorsqu’il va à l’école (il a manqué en moyenne un jour par semaine) il joue 4h et regarde la TV jusqu’à minuit, une heure du matin. Il est en 5° et le travail scolaire est très insuffisant avec un 6 de moyenne sur l’année. Se couchant tous les jours après 23h il n’arrive pas à mémoriser et à rester concentré sur les apprentissages. Quand les parents essaient de limiter son temps d’écran il entre dans des crises d’une grande violence. S’ils persistent, il met en place des stratégies pour rendre insupportable leur vie : quand le père téléphone il vient crier des insanités tout proche du téléphone ; il crie ; il harcèle jusqu’à ce que le temps de jeu lui soit accordé pour jouer à l’infini comme il le demande. Quand il est sur son jeu alors la maison retrouve son calme jusqu’à la prochaine crise, qui surviendra le jour suivant après son lever vers midi.  

A est entré en contact avec les écrans dès sa naissance, la mère mettait le téléphone dans son berceau pour l’endormir ou le faire patienter en lui faisant écouter des comptines et des berceuses. L’intention était louable, elle voulait répondre à une forme éducative de présence par la musique douce et la culture. Sauf qu’associée à la musique et aux sons, il y a la luminosité de l’écran. L’enfant trouve très vite comment utiliser les touches pour faire varier la luminosité. Il apprend rapidement à utiliser les touches pour mettre de lui-même les musiques et les images qu’il aime. Ainsi, dès la toute petite enfance comme dès qu’il a eu contact avec les tablettes, avant d’avoir la maitrise de leur utilisation comme un outil de connaissance il s’est créé subrepticement un désir d’aller chercher la lumière et l’animation de l’écran. Puis, inévitablement ce désir s’est transformé en besoin d’avoir à sa portée l’objet de ses envies immédiates. Ce besoin est devenu en quelques mois un besoin irrépressible et dominateur créant un tel manque que seule la colère et la violence contre soi (A.se tape la tête contre les meubles) contre le matériel (il a cassé les vitre de la véranda et le parebrise de la voiture de son père) et contre les autres (il tape sa mère et son père  à coup de bâton).

L’interdit du jeu est arrivé trop tard car il n’a jamais fait la rencontre de la frustration sans compensation ; dès qu’il avait le sentiment d’un manque ou d’une insatisfaction, il avait à sa portée l’objet qui venait la combler. Il a vécu sans obstacle réel car ils étaient tous compensés. La rencontre de l’interdit sans possibilité de compensation est une nouvelle pratique et un nouveau langage dont il n’a pas les compétences pour les assumer. Il vit alors un vide existentiel qui le projette dans une angoisse et une colère que seuls des actes qui ont des effets visibles peuvent apaiser

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